J’ai lu très exactement 27 romans en 2017, en baisse continue depuis 2015 ! De tous ces romans, goût personnel oblige, un nombre non négligeable est à consonance scientifique. Voici une sélection personnelle de ceux dont je recommande la lecture (et, pour mémoire, les listes de 2014, 2015 et 2016) :

N° 7 : Some of us glow more than others de Tania Hershman, 2017

En 140 pages, ce recueil livre 41 histoire courtes souvent empreintes de science. Je retiens notamment Switchgirls raconté du point de vue des rats de laboratoire ; The Plan or You Must Remember This qui décrit en quelques chapitres antéchronologiques une expérience sur cobaye humain, de son terme à son début ; The Party où des biochimistes sont l’attraction d’une soirée réunissant des physiciens, mathématiciens… et même un prix Nobel ; et There is No-One In the Lab Tonight But Mice qui décrit avec ironie une grève surprise des chercheurs du monde entier, pendant un an : A simpler time, we said, who needs constant novelty? Besides, we wrote, who really undrstood what the scientists were doing anyway? We couldn’t read their journal articles, their reports. We’re better off like this, we said cheerfully.

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N° 6 : Les Veilleurs de Connie Willis, 2015

Cette anthologie d’une auteure que j’ai déjà cité sur ce blog nous emmène dans une science-fiction simple, loin des vaisseaux spatiaux et des civilisations post-apocalyptiques. Deux nouvelles en particulier méritent de figurer dans ce classement : “Au Rialto” raconte un congrès de physique quantique complètement loufoque, où les choses ne sont pas ce qu’elles semblent. Effet du principe d’incertitude, du paradoxe EPR ?… “Infiltration” est un texte zététique qui s’amuse à démasquer les spirites et autres médiums, dans un hommage appuyé à H. L. Mencken (le fameux “procès du singe” est même mentionné).

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N° 5 : Intrusion de Ken MacLeod, 2012 (non traduit en français)

Dans un futur proche, la biologie de synthèse fournit des améliorations pour la santé et l’environnement… que la surveillance généralisée et la pression sociale (“transparence”) a rendues obligatoire. Que devient la liberté individuelle, du libre arbitre ? L’intrigue tourne autour d’un médicament à prendre, ou pas, pendant la grossesse pour modifier le génome du fœtus et éviter les tares, les maladies infantiles… En prime, un des personnages mène une thèse en sociologie des sciences intitulée “Convergent agent-constitutive discursive practices in emergent technological networks: the case of a dry-lab synthetic biology team”. L’auteur ironise même quelque peu sur cette discipline

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N° 4 : L’Homme qui mit fin à l’histoire de Ken Liu, 2011

Un couple de chercheurs, lui historien, elle physicienne, invente un moyen emprunté à la physique quantique des particules pour retourner dans le passé. Une seule et unique fois par période visitée, pour une seule et unique personne, et sans aucune possibilité pour l’observateur d’interférer avec l’objet de son observation… Première destination : les exactions perpétrées par l’unité 731 de l’armée japonaise dans la Mandchourie occupée. (À noter que la nouvelle peut être lue gratuitement en anglais sur le site de l’auteur.)

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N° 3 : Jamais avant le coucher du soleil de Johanna Sinisalo, 2000

Finlande. Ange rentre d’une soirée où il a un peu bu, aperçoit une bande de jeunes qui malmène un enfant petit, mince, et pelotonné dans une posture étrange, comme totalement désarticulé : un troll d’un an, dix huit mois tout au plus. Ange va le recueillir chez lui, et apprendre à l’apprivoiser. Entremêlé d’extraits de contes et légendes, d’ouvrages zoologiques et de faits divers tirés de la presse, ce roman nous émeut, nous fait réfléchir, et nous secoue les tripes quand les choses ne se passent pas tout à fait comme prévu !

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N° 2 : La recherche de l’Absolu d’Honoré de Balzac, 1834

Un riche Flamand se prend de passion pour la chimie : Balthazar se passionna pour la science que cultivait Lavoisier et devint son plus ardent disciple. Pour découvrir le secret de l’Absolu, c’est-à-dire l’unité de la matière, il va ruiner et mettre à l’épreuve sa famille : Je le vois, la science est plus puissante en toi que toi-même, et son vol t’a emporté trop haut pour que tu redescendes jamais à être le compagnon d’une pauvre. Une vision balzacienne de l’hubris du scientifique, abandonnant la vie domestique pour une quête démesurée. Selon Jacques Bergier, Balzac se passionnait pour les merveilles de la chimie et on retrouve dans ce roman des échos de Frankenstein.

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N° 1 : Le Roman du mariage de Jeffrey Eugenides, 2011

Ce roman met en scène un trio d’étudiants en études littéraires, en théologie et en biologie. Du coup, l’auteur de Virgin Suicides nous offre des scènes très réalistes en labo de recherche, avec le coup de théâtre d’un Prix Nobel attribué à un personnage inspiré par Barbara McClintock : Depuis trente-cinq ans, elle inspectait son maïs avec une patience mendélienne, sans que personne ne l’encourage ni ne lui donne son avis sur son travail. Elle se contentait de venir travailler chaque matin, guidée par son processus de découverte, oubliée du monde et s’en moquant. Et aujourd’hui, brusquement, la consécration : le Nobel, la justification d’une vie de travail. Elle avait l’air heureuse mais on voyait que ce n’était pas après ça qu’elle courait.

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